LE PRÉSENT PUR
Une course en montagne n’est pas un exutoire, un simple moyen d’aller se défouler. On ne fuit pas en montagne sinon on se tue. On va se retrouver pour revenir vivant. Partir loin des foules, dans des milieux sauvages et vierges, c’est un peu comme un voyage dans le désert.
On ne revient jamais le même.
Au delà de la découverte d’un espace préservé, c’est avant tout de soi que l’on apprend, dans sa virginité profonde. Sa rudesse dans l’effort, sa capacité à se battre dans les moments de fatigue ou de difficulté.
C’est se remettre en question et s’accepter un peu plus. Se rendre compte que s’il est chose à conquérir, ce ne sont ni le sommet, ni la montagne, mais son esprit et ses croyances.
Apprendre le goût de l’effort, le partage. L’esprit d’équipe qui saura s’adapter au rythme du plus faible pour peut-être atteindre le sommet…Ou pas.
Savoir faire demi tour justement, malgré les tentations et au vu des dangers que la montagne transpire.
Emprunter au mieux ses courbes et y laisser sa trace. Créer son propre chemin est une chose peu banale. Le seul que l’on construit ne s’écrit pas sur une carte, ne se trouve pas sur un plan ou dans le doigt pointant d’un touriste de passage.
Non, là on trace son chemin comme on dessine sa vie. On fait de notre mieux et pour le bien de tous. Libre malgré les obstacles. Pas à pas continuer d’avancer sans jamais être sûr mais garder à l’esprit que peut-être il faudra renoncer.
Finalement, se retrouver à prendre des décisions, tenir des objectifs, s’adapter dans l’instant pour rectifier, corriger une erreur. Ne pas s’enfermer dehors, dessous. S’aveugler à la lueur de l’or blanc, pour une convoitise qui mettrait un chapeau pointu sur l’î du mot bêtise, un voile blanc posthume sur l’audace déraisonnée.
C’est toucher le ciel et vivre la victoire comme un soleil, être là si haut, si fier.
Être un instant soleil et se l’inscrire sur le blason de l’estime de soi. C’est se savoir capable, c’est devenir plus fort et s’en griser en toute légitimité.
Reconnaitre face à face avec soi même que la vie n’est pas si dure, que ça vaut encore le coup, malgré les emmerdes les embrouilles et ce monde qui marche bientôt à l’envers.
C’est se dire qu’il faut rentrer, surenchère en péril et s’appliquer encore car tant qu’on est dehors on est pas rentré chez soi.
Pas d’excès de confiance, pas de dopage à la suradrénaline. Vivre encore cette précieuse desescalade, cette longue glissade. Ce retour à la caverne avec le feu que l’on mettra dedans.
C’est se savoir chanceux, sans oublier qu’on l’a aussi décidé. C’est rentrer chez soi pour le partager avec soi, avec toi et se dire qu’il est des jours merveilleux quand on ouvre les yeux.
Votre guide
Benjamin